La dimension qui fait échouer les politiques.

Comment une organisation structurée avec des gens globalement compétents, ayant des moyens importants, relativement libre de ses agissements, portée par une majorité démocratiquement élue peut-elle être régulièrement en difficulté?

Le paradoxe de la politique c’est que son pouvoir supposé n’est pas son pouvoir réel. La distance entre prévision et accomplissement est l’exact passage ou étranglement qui précipite notre vision prospective dans une réalité mouvante qui nous échappe en permanence. Le politique doit être un visionnaire et paradoxalement les sollicitations de son électorat dans un espace-temps contraint l’amène à garder la tête dans le guidon au lieu de lever les yeux vers les justes perspectives d’avenir. Pris par l’urgence de l’immédiateté, le politique sans « vision » est condamné à un rattrapage circonstanciel de tous les instants, il applique avec sérieux et conscience un pansement sur une jambe de bois dont la matière même est changeante.

Pourtant les efforts déployés sont énormes et les institutions fonctionnent, le parlement fait son travail, les députés et sénateurs s’attellent à trouver des solutions. On évoque la mondialisation, les contraintes externes, les directives européennes et bien d’autres prétextes pour se déculpabiliser de résultats sinon bien maigres du moins modestes par rapport à l’énergie développée. C’est comme si nous n’étions pas responsables et acteurs de notre politique, comme si nous n’avions pas choisi nos responsables, comme si l’assumation ne devait pas être collective. L’abstention montante à certaines élections devrait interpeller, lorsque l’adhésion devient minoritaire le pacte social est en rupture, l’inertie et la résistance se développent, la gouvernance ressemble plus à un forcing proche du dictat qu’à un parcours harmonieux non sans difficultés mais enthousiasmant et mobilisateur vers le progrès.

Les politiques enferment bien souvent les citoyens  dans leurs schémas, les partis donnent leurs lignes et stigmatisent ceux qui tentent des inflexions ou des rénovations, les empêcheurs de tourner en rond sont priés d’aller voir ailleurs. Parfois ce n’est pas Mozart qu’on assassine mais son compagnon le plus proche, celui qui a l’outrecuidance de s’affranchir, de tenter une voie nouvelle, de sortir des sentiers battus…l’immobilisme est toujours sécuritaire, les réformateurs sont de dangereux utopistes, des naifs qui ne connaissent pas la réalité (que dire de ceux qui en responsabilité s’ approchent difficilement de celle-ci?). Pourquoi donc cette incapacité à enthousiasmer les foules de braves citoyens qui n’attendent qu’un soulagement de leur vie quotidienne, une respiration plus ample, une bouffée d’oxygène dans leur océan d’ennui et de labeur…

Prenons un troupeau de moutons (n’y voyez pas malice) dans une région montagneuse et escarpée. Supposons que le berger à distance l’ ait bien à l’oeil et que ses fidèles compagnons surveillent de façon vigilante, les mouvement de son troupeau. La question se pose certainement pour lui de savoir jusqu’où son troupeau peut se déplacer sans qu’aucune bête ne soit en danger. Pensez-vous que les chiens empêchent tout mouvement du troupeau? Le déplacement de ce dernier n’est-il pas libre ?

De fait, le côté grégaire permet une sécurité des individus contre les agressions extérieures, une sécurité des plus jeunes…mais le troupeau n’est pas à l’abri d’une orientation hasardeuse vers les escarpements rocheux, les falaises ou avens…Le berger par sa connaissance du terrain, sa vision périphérique et la fidélité et l’obéissance de ses chiens peut s’adapter aux mouvement de son troupeau en lui garantissant un minimum de sécurité. Il ne peut toutefois pas empêcher les accidents ponctuels d’arriver.

Le mot liberté est semble t-il bien lié à celui d’adaptabilité, accompagner sans arrêter, suivre sans laisser tomber ou mettre en danger, respecter et prévenir. L’imprévisibilité que les politiques n’assument pas c’est cette dimension humaine du vivant en perpétuel évolution émotionnelle. Les statistiques si précises, les échantillons normés pour les sondages, les recherches de profils sont figés dans des instants, photographiés dans une histoire déjà dépassée et le vivant avance et s’échappe des carcans dans lesquels on aimerait bien l’observer, le capturer. Toute supputation comportementaliste est donc vaine, il faut être visionnaire et prendre continuellement le poul de ce troupeau en « mouvement perpétuel ». En pensant en terme de résultats à échéance, on ne comprend pas que la ligne directrice ne pourra pas être gardée. Les inflexions  et les paramètres accidentels sont trop nombreux(la mondialisation, l’Europe ne font que complexifier les choses). C’est une stratégie adaptative et une structure souple qui permettra aux politiques de recoller à la réalité humaine qu’il est sensé conduire mais qui plus souvent qu’il ne le croit le conduit et l’entraîne vers des lieux à grands risques. Certaines personnes commencent à comprendre que sans adhésion globale, le dirigisme politique même légitimé par des votes démocratiques peut amener à des blocages sociaux. La démocratie participative, le vote d’initiative populaire, les référendums pourraient être des outils non négligeables pour une politique de demain qui prendrait réellement en compte l’évolution de la pensée sociale et son opinion. En sentant plus souvent le poul réel du peuple, socle de son élection les politiques recollerait à une réalité qui leur échappe parce que détenteur d’un pouvoir délégué, ils accepteraient d’écouter à nouveau ceux qui donnant leur confiance souhaitent qu’ils la méritent. Les démissions sont rares en politique, c’est un peu comme les remises en question, il faut beaucoup de courage pour les accepter.

C’est donc l’homme, sa pensée mouvante, ses sentiments et émotions qui font échouer nombre de politiques bien ficelées. Raison de plus pour humaniser cette politique et s’éloigner de modèles froids et rigides qui sont toujours en danger de mener à des systèmes fermés, concentrationnaires, dictatoriaux. C’est la vision de l’homme en perspective qui sauvera pour une part la politique de ses impasses, la nature fera le reste et peut-être échapperons nous à de sombres perspectives…la balle est dans notre camp. La faute n’est pas chez les autres, elle est en chacun de nous, élevons notre conscience.

Un commentaire pour La dimension qui fait échouer les politiques.

  1. Stephen Mulry dit :

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